A la rencontre de Maryvonne ERDAN-NICOLAS, Chorégraphe et coordinatrice régionale d'handidanse
Ce dimanche, 23 juin 2019, à l’aéroport Pôle Caraïbe, était accueillis la délégation Antilles d’handidanse fraichement sacrée champion national de France.
A cette occasion, je suis partie à la rencontre de Maryvonne ERDAN-NICOLAS chorégraphe de l’Espace Temps’Danse et coordinatrice de cette aventure.
Comment vous êtes-vous qualifiés ?
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « En ma qualité de coordinatrice régionale Antilles Guyane, cela fait 3 ans que j’exerce la pratique Handidanse sur le territoire (Guadeloupe, Martinique et Guyane). Nous avons effectué des démarches auprès de la DAC (Direction des Affaires Culturelles) pour permettre à certaines structures d’accéder à cette pratique, dont « LES AIRELLES ». Le Centre « LES AIRELLES » a pu bénéficier d’une aide, à raison d’une heure de cours par semaine. Du coup, nous avons participer à la rencontre régionale d’Handidanse qui s’est déroulée les 18 et 19 mars 2019, au palais des sports Laura FLESSEL à PETIT-BOURG. La fondatrice d’Handidanse, Mme Cécile AVIO, étant sur place, c’est donc elle qui a choisi le coup de cœur qui partirait représenter les Antilles au niveau national.
Dans un premier temps, nous avons travaillé en fonction des pathologies de chacun au cas par cas. Et dans un deuxième temps, chorégraphiquement parlant, nous avons créé différents mouvements par rapport à leur mobilité, afin de permettre aux usagers de gagner en amplitude et en confiance à chaque séance de danse. »
Comment la préparation au championnat s’est-elle organisée ?
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « Nous n’avons pas eu énormément de temps pour préparer ce départ. Nous avons sollicité quelques sponsors, comme la DAC, qui nous accompagnait déjà dans ce projet handidanse. Nous avons payé en totalité les billets d’avion en jouant sur une formule de groupe. La structure a dû utiliser le mode « transfert » afin de pouvoir bénéficier de fonds pour pouvoir partir. La compagnie Corsair a pu s’organiser pour faire voyager 6 usagers en fauteuils roulants, dont 1 électrique. Le voyage de 8h s’est très bien passé. Nous craignions que certains ne puissent pas supporter la durée du voyage, mais grâce à l’accueil des hôtesses, nous avons pu leur permettre de se sentir mieux. C’était une expérience inoubliable pour beaucoup. »
Racontes-nous cette formidable aventure.
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « Quand « LES AIRELLES » ont été choisi Coup de Cœur Régional, nous avons préparé une deuxième chorégraphie, sur la musique de Stevy MAHY, artiste locale, toujours à raison d’une heure par semaine. Nous nous entrainions le vendredi de 9h à 10h au Centre « LES AIRELLES », afin d’amoindrir la mobilité dû à leur handicap, car leur déplacement engage beaucoup de responsabilité.
Les usagers et l’ensemble du personnel, dont les éducateurs ont réellement joué le jeu pour ce projet au niveau des répétitions. Pour la création des costumes, j’ai émis quelques idées, mais se sont eux qui ont réaliser les confections dans leur établissement. Arrivé en France, tout s’est bien passé, car nous avons fonctionné en collaboration avec un autre foyer. Donc l’alimentation, le couchage et les soins étaient adaptés. La cohésion important du groupe a permis que tout se passe bien. Tout le monde a mis « la main à la pâte ». C’était vraiment une belle aventure pour les enfants parce que pour certains c’était la première fois qu’ils voyageaient en avion. Juste que certains n’ont pas bien supporté le changement de température, mais au-delà de cela c’était une aventure énorme. Nous avons pu rencontrer d’autres structures, plus de 930 danseurs qui participaient au championnat national, ce qui nous a permis d’être remarqué parmi tant d’autres.
Ce voyage permis de mettre en avant un aspect pédagogique en visitant Dunkerque. Notamment les ports, le parc zoologique. Nous avions un carnet de bord, ce qui permettait de bien occuper les journées avec différentes activités. Seules les répétitions étaient obligatoires, bien sûr, puisque pour tout champion le travail et la persévérance sont nécessaire. »
D’où t’es venu cette passion pour la danse ?
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « Comme ma mère me le disait, souvent je dansais déjà énormément dans son ventre »
Racontes-nous tes débuts ?
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « A 4 ans, j’ai commencé par la danse classique. Cela a duré pendant 9 ans. Puis j’ai découvert le jazz, et là j’ai trouvé cette fibre artistique qui m’a animée par la musique jazz, la danse syncopée, la rythmique, la mouvance et j’ai vraiment adhéré. Et comme tous, je suis partie travaillé en entreprise, pour prendre le relai de mes parents. Je l’ai fait pendant environ 4 ans. Et la danse m’a rappelé …
Quelles ont été les étapes de ta carrière ?
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « Je suis restée longtemps danseuse interprète. J’ai dansé dans différentes compagnies et différentes écoles. Un jour, ma mère a vu, qu’il y avait une formation à l’Artchipel pour se professionnaliser. J’ai donc passé l’EAT (Examen d’Aptitude Technique) en candidat libre. L’année d’après, j’ai enchainé sur le DE (Diplôme d’Etat) que j’ai eu avec mention. J’en suis sortie major de ma promotion. Il me fallait un projet pour solder mes actions, je me suis donc penchée sur la personne en situation d’handicap, car mon père étant coordinateur du téléthon, j’ai grandi dans ce milieu, en voyant d’autres personnes, surtout des enfants bulles, des enfants atteint de myopathie (maladie des muscles). J’ai réalisé que j’avais de la chance de pouvoir vivre mes rêves. »
Pourquoi avoir choisi l’Handidanse ?
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « J’ai choisi l’Handidanse après avoir vécu une situation inoubliable avec un myopathe lors du téléthon. Je devais faire un solo et je me suis retrouvée à faire un duo. Il y a eu ce contact entre nous par le regard. J’ai trouvé magnifique de pouvoir faire danser tout le monde. Ce jour-là, je me suis dit pourquoi pas ? … Pourquoi pas lui ? Je me suis jurée que plus grande, si je devais continuer ma carrière de danseuse, que je permettrai à tout le monde de danser, de rendre la danse accessible à tous, parce qu’on ne choisit pas d’être, on est tout simplement. La personne en situation d’handicap … Pourquoi j’ai choisi ce publique ? C’est un publique vrai, ça passe ou ça casse. Ils ne savent pas faire semblant. Ils sont dans l’émotion, et ils nous donnent tellement d’amour … Ils nous donnent des leçons de vie. Et si finalement, tout le monde pouvait comprendre qu’on n’est rien sur terre et que le mot clé est AMOUR, je pense que nous serions plus loin. »
Comment te vois-tu dans l’avenir ?
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « Dans l’avenir, je compte persévérer dans ce domaine par mes actions, car il reste encore beaucoup à faire. Nous connaissons les handicaps visibles, mais il y a aussi les handicaps invisibles, tel que : les aveugles, les sourds et malentendants, les drépanocytaires, les autistes qui sont des personnes magnifiques. De jours en jours, je constate que j’en apprends beaucoup plus sur moi-même par eux. Ils me permettent d’apprendre à me canaliser, à relativiser et surtout à voir plus loin, à ne pas blâmer une contrariété. Ils ont la joie de vivre, la niaque de pouvoir exister, et je pense qu’ensemble nous pourront aller plus loin.
Dans l’avenir, j’aimerai pouvoir permettre à tous, valides et personnes singulières de pouvoir danser. Que cela soit une seule institution, que nous soyons dans l’inclusion totale. Mon école l’Espace Temps’Danse à GOURBEYRE, a pour objectif l’inclusion pour tous. J’ai des élèves valides, et je leur apprends à accepter les autres, à utiliser les MOTS de manière positive. Je leur apprends à accepter le regard des autres dans les deux sens, aussi bien pour les personnes valides que pour les personnes singulières et que nous formons qu’un seul monde. Nous sommes tous humains, et nous avons tous notre place sur cette terre.
Dans l’avenir l’Espace Temps’Danse continuera de progresser. Nous cherchons des fonds, car il est vrai que pour les déplacements, nous avons besoin de voitures TPMR adaptées. L’espace Temps’Danse dispose déjà des locaux adaptés. Je propose la pratique danse et handidanse, et je souhaite vraiment que tout le monde puisse trouver sa place. La danse, finalement, c’est juste un moyen d’expression qui permet à tous de faire sortir les MAUX et les MOTS qu’ils ont, de se faire comprendre et d’exister. »
Le mot de la fin …
Maryvonne ERDAN-NICOLAS : « La pratique handidanse a été créée par la fondatrice Cécile AVIO. Que cette pratique existe depuis plus de trente ans en métropole. En Guadeloupe, elle a vu le jour il y a 3 ans. Je suis coordinatrice régionale handidanse en Guadeloupe, mais en ma qualité de professeur Maryvonne ERDAN-NICOLAS, fondatrice de l’école ESPACE TEMPS’DANSE, je pense que c’est la première école dans les Antilles, qui puisse vraiment donner la place aux personnes en situation d’handicap dans le monde culturel. Cette passion permet à tous le dépassement de soi, l’acceptation de soi et surtout d’être dans la valorisation totale.
Quand on a fini de danser, mes plus belles récompenses sont les sourires, les larmes de joie de chacun de mes élèves.
J’encourage tout le monde à se former. La prochaine session handidanse aura lieu en janvier 2020 à l’Espace Temps’Danse avec la fédération française handidanse. Ensemble nous pourrons aller plus loin. Je ne pourrai pas mener le combat seul, donc j’ai besoin qu’un maximum de personne s’implique. Que celles et ceux qui sont intéresser viennent faire cette formation, car il faut connaître les pathologies des personnes en situation d’handicap pour travailler avec eux. On ne se déclare pas professionnel de l’handidanse sans avoir passer la formation et l’examen, afin d’être apte à donner des cours, ne pas mettre la personne en situation d’handicap en danger et ne pas la frustrée. Comprendre la pathologie c’est pouvoir faire de ces êtres, des belles âmes. L’handicap n’est pas facile, le travail non plus. Parfois les répétition s sont très lourdes, on a l’impression de travailler dans le vide, mais on se rend vraiment compte que ça passe par le corps. »
Ma devise c’est : Aimes ta danse, dans ta vie, et vis ta danse !
Un grand merci à Maryvonne ERDAN-NICOLAS de m’avoir accordé cette interview, de permettre au public de la connaître et de connaître l’handidanse.
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Auteur : Syndie BENOIT
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